Supporter du FC Rouen depuis l’immédiat après-guerre et à l’aube de ses 90 printemps, René Demarest va fouler la pelouse de Diochon samedi pour donner le coup d’envoi du match face à Evreux. Une émotion particulière pour ce fidèle parmi les fidèles.

 

Monsieur Demarest, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis né le 16 mars 1933, j’habite Rouen depuis 1954. J’ai d’abord aidé mes parents dans la ferme familiale avant de devenir représentant de commerce après l’Armée, d’abord dans les produits laitiers puis dans le matériel pour les grandes surfaces. J’ai travaillé de 13 à 62 ans, c’était une autre époque…

Quel est votre premier souvenir lié au FCR ?

Je suis présent depuis 1946, ce qui représente plus de 76 ans de fidélité. Je venais de la campagne, à Saint-André-sur-Cailly, 50 km aller-retour à vélo pour venir voir les matchs, été comme hiver. Le premier, c’était un Rouen-Sète et on avait gagné. Je suis tombé dans la marmite ce jour-là et je n’en suis plus sorti (rire).

Vous avez assisté à un nombre incroyable de matchs du FCR…

Oui, c’est ma fierté. Les années de présence au stade c’est une chose mais j’ai très peu manqué de matchs pendant toute cette période, hormis pendant mes deux ans de service militaire obligatoire. J’avais fait le compte il y a quelques temps, j’étais à environ 1 800 matchs. Je pense être la personne encore en vie qui a vu le plus de rencontres du FCR. J’aurais dû garder les tickets, ça m’aurait fait un grand sac collector.

Parmi ces centaines de matchs, quels sont ceux qui vous ont marqué ?

Il y en a eu de très grands. Après la guerre, avec les Rio, Blondel, Duhamel, Dambach… J’ai eu la chance en 1954 d’assister au 8e de finale de Coupe de France face au tenant du titre, le LOSC. On avait gagné 2-0 en établissant le record du nombre de spectateurs au Parc des Princes. J’ai aussi assisté au match de Coupe des villes de foire face à Arsenal. La queue aux guichets était incroyable… Mais mes meilleurs souvenirs, ce sont les années 60-70, qui nous ont fait rêver. Corbel, Legrand, Latron, Bravo et Buron… Le FCR tutoyait les sommets, c’était exceptionnel.

 

Pendant la semaine, je me disais : « Samedi, il y a match », et ça me remontait le moral

 

Vous qui avez connu cet âge d’or, prenez-vous toujours autant de plaisir aujourd’hui que le FCR est plus bas dans la hiérarchie ?

Absolument. Ce n’est pas une question de niveau. C’est facile d’être présent pour les grands matchs. Mais j’ai aussi connu des époques où on pouvait compter les spectateurs. C’est là que se juge la fidélité d’un supporter. On n’était pas nombreux mais on défendait notre club jusqu’au bout. Aujourd’hui, je prends toujours autant de plaisir à venir au stade. J’y vais avec autant d’enthousiasme malgré mes 90 ans à venir. Vous savez, ce club me donnait un but dans la vie. Pendant la semaine, je me disais : « Samedi, il y a match », et ça me remontait le moral. Le FCR, c’est une image de ma vie. C’est pour ça que j’y tiens et que je m’y accroche, à ce club.

Occupez-vous toujours la même place à Diochon ?

Oui, dans le carré du 12 de la Lenoble. Je m’y plais bien. Je fais partie du 12 Rouennais depuis sa création, en 2004 par la regrettée Arlette Toussaint, qui l’a fondé avant de nous quitter en 2016 et qui a été repris brillamment par Bertrand Hautot.

Samedi, vous donnerez le coup d’envoi du match. Ressentirez-vous une émotion particulière en entrant sur le terrain ?

Absolument. Parce que je n’ai jamais posé le pied sur la pelouse de Diochon. Je donnerai le coup d’envoi avec beaucoup d’enthousiasme et de joie. J’aimerais remercier le président Charles Maarek et avoir une pensée pour monsieur de Wailly. Je pense également à tous ceux qui font vivre ce club qui nous est si cher : les joueurs, le staff, les sponsors, les bénévoles… J’espère nous porter chance et que la victoire sera au rendez-vous.

Quel est votre souhait pour le club ?

Je souhaite que le FCR vive et continue sa route, tout simplement. Les années passent mais avant de quitter cette ville aux cent clochers que j’aime tant, j’aimerais un jour revoir le FCR à l’étage au-dessus. En 2e division, ce serait bien…