Peu de joueurs dans l’histoire du club peuvent se vanter d’avoir joué 11 saisons consécutives – dont 9 en D1 – sous le maillot rouge. Philippe Poulain fait partie de ce club très fermé et donnera le coup d’envoi de Rouen-Blois samedi soir. Entretien sans langue de bois avec une légende du FC Rouen.

 

Philippe, vous avez joué 223 matchs sous le maillot du FCR. Comment expliquez-vous cette incroyable fidélité au club ?

C’était déjà rare à l’époque de faire toute sa carrière – ou quasiment – dans le même club. Moi j’ai juste joué une saison à Angers en fin de carrière. Mais bien avant ça, à la fin des années 50 j’ai manqué de partir au grand Stade de Reims, à 17 ans. Albert Batteux avait appelé Paris-Normandie pour me contacter mais le père Monin, qui était malin et avait bien fait son boulot, m’avait fait signer un contrat stagiaire avec une clause de non-sollicitation.

Pourquoi ce club est-il si cher à votre coeur ?

Parce que je le connais comme le fond de mes poches. Je suis lié à son histoire depuis 70 ans. Monin, Melchior, Notheaux, Horlaville, Sauvage, Dos Santos, , Guez… Je les ai tous connus.

Quel est votre meilleur souvenir avec le FCR ?

Peut-être le match de 1968 face à Saint-Etienne. On était dernier avec 13 points en 23 matchs et en plus de ça, il y avait des problèmes au club. Et les Verts étaient leaders. C’était l’équipe des Herbin, Jacquet, Keita, Revelli, Beretta… Pourtant, on leur a mis 3-0. Le point de départ d’une remontée fantastique et, alors que tout le monde nous voyait descendre, on a sauvé la place du club en D1.

Vous aviez la réputation de ne pas vous laisser marcher sur les pieds…

Ah ça, je rendais les coups (rire). C’est vrai que je jouais rude, mais je n’ai jamais blessé un joueur. Un jour, face à Nancy, je tacle leur avant-centre qui se ramasse sur le terrain sec et se râpe la cuisse. Il se relève et en passant devant moi, il me dit : « Petit, la prochaine fois je te mets les crampons sur le genou ! » Mon coéquipier Phelipon entend ça, dix minutes plus tard il l’attrape à son tour et il ne le rate pas. L’autre avait la cheville qui gonflait à vue d’œil !

 

« D’Ornano a l’air d’être un bon entraîneur »

 

Après votre carrière, vous avez tenté de vous impliquer dans la gestion du club…

J’ai tenté de reprendre le club à cinq reprises, avec des projets solides à chaque fois : je faisais jouer mon réseau pour le financement mais aussi pour le recrutement vu que j’étais copain avec Budzynski, Biancheri, Suaudeau, Molinari… Mais je m’étais fait pas mal d’ennemis, les politiques et les dirigeants en place n’ont jamais joué le jeu.

En 1969, vous quittez le FCR pour Angers. Pourquoi ?

Le club devait organiser mon jubilé parce que j’avais 10 saisons en professionnel sous le même maillot, c’était le règlement à l’époque. Mais le club a refusé alors j’ai foutu le camp à Angers, malgré le fait que je tenais un magasin à Rouen.

Comment avez-vous vécu la suite de l’histoire du club ? La D1 dans les années 80, puis les déboires…

J’ai été désabusé de voir que la plupart des politiques en place n’ont jamais rien fait pour aider le club quand il était dans la mouise. Mais c’est comme ça…

Vous venez encore à Diochon aujourd’hui ? Votre avis sur le début de saison de l’équipe ?

Je suis très heureux qu’ils aient gagné à Rennes. D’Ornano a l’air d’être un bon entraîneur. Il prône un jeu à terre, c’est intéressant à regarder.